[MUSIQUE] Bonjour à tous. Les médias regorgent d'actualités, toujours plus nombreuses, concernant l'impact des pollutions sur notre santé. Vous pourriez penser que c'est un nouveau problème, un problème des sociétés contemporaines. Je vais vous montrer qu'il n'en est rien. L'histoire de la santé et de l'environnement est une vieille histoire. Au XIIIe, la pollution de l'air existe déjà . Edouard 1er, à Londres, doit même interdire l'utilisation de la ouille bitumineuse, qui était d'usage courant. Mais avant la question de l'air, le problème central de nos villes a été celui de l'eau et des déchets. Jusqu'au XVIIIe siècle, on jette tout par la fenêtre. Et dans la rue. Les eaux usées, les excréments, les déchets. La première loi interdisant de tout jeter dans la rue, date du XVIIIe siècle. Le mot d'ordre était la lutte contre le tout-à -la-rue. C'est à cette même époque, que l'on fait le lien entre l'insalubrité des villes, et les grandes épidémies, de peste, de choléra ou de tuberculose qui ont décimé des milliers de personnes, à Paris ou en province. C'est un mouvement européen. Londres, en 1858, est confrontée à ce qu'on a appelé la Grande puanteur, qui sera à l'origine du mouvement hygiéniste. Mais la question de l'air se pose aussi très vite, avec le développement de l'industrie et de l'usage domestique du charbon. En décembre 1950, Londres est confrontée à une vague de brouillard tellement intense, qu'elle obligera à interrompre toute forme de circulation, car la visibilité était inférieure à dix mètres. Le brouillard pénètre partout, même dans les logements. A tel point, que les projections cinématographiques doivent être interrompues : on n'y voit plus. Le Great London smog fera plus de 12 000 morts. Et, c'est l'accumulation de particules dues à la combustion du charbon pour le chauffage, et des conditions météorologiques particulières, qui expliquent ce dramatique épisode. La première grande loi britannique sur l'air, le Clean Air Act, est donc votée en 1956. La France votera, elle, la loi sur l'eau en 1964, et créée son premier ministère de l'environnement en 1970. Vous le comprenez : l'histoire entre la santé publique et la pollution est très ancienne. Mais elle fut longtemps confondue avec la salubrité publique. La notion même de santé environnementale est beaucoup plus récente. Il faut attendre 1989, pour que soit organisée la première conférence de l'OMS réunissant les ministres de la santé, avec les ministres de l'environnement, en Europe. C'est l'adoption de la charte européenne de l'environnement et de la santé. Puis, en 1992, la célèbre conférence de Rio, sur le développement durable, reconnaît, pour la première fois, que la lutte contre les pollutions est une préoccupation sanitaire mondiale. Elle cible tout particulièrement les problèmes de l'approvisionnement en eau, l'assainissement, et l'hygiène. Alors, pourquoi ce concept est-il nouveau, et comment définir la santé environnementale? Jusqu'à présent, les ministres de l'environnement et ceux de la santé, travaillaient séparément. On s'intéressait aux maladies contagieuses et aux comportements nocifs pour la santé, on s'intéressait aux grandes pollutions, mais on considérait que les petites pollutions de notre environnement quotidien, n'avaient qu'un impact marginal sur notre santé. Comme dans notre tradition philosophique et culturelle, notre conception de la santé séparait clairement l'homme, de l'environnement. On ne confond pas l'homme dans la nature. C'est la raison pour laquelle la nouvelle approche de l'OMS, qui considère que la santé est aussi la conséquence de notre environnement, a été une grande rupture. La définition de la santé environnementale, ou Environmental Health, par l'OMS, est très large. Selon l'OMS, elle comprend : les aspects de la santé humaine, y compris la qualité de vie, qui sont déterminés par les facteurs physiques, chimiques, biologiques, sociaux, psychosociaux, et esthétiques de notre environnement. Elle concerne même la politique et les pratiques de gestion, de résorption, de contrôle et de prévention des facteurs environnementaux, susceptibles d'affecter la santé des générations actuelles et futures. C'est une définition très large. Certains considèrent même qu'on peut y intégrer les comportements sociaux et alimentaires, tels que : le tabagisme, l'insuffisance d'activité physique, ou une consommation excessive d'alcool. Mais, il est couramment admis que la santé environnementale est une notion plus étroite, qui exclue ces facteurs comportementaux. Elle recouvre l'impact de notre environnement physique, et tout particulièrement des pollutions, sur notre santé. Et vous devez comprendre que les enjeux ne sont pas anecdotiques. L'OMS estime que 23 % des décès dans le monde peuvent être attribués à des facteurs environnementaux. Commençons par un sujet bien connu : la pollution de l'eau. Chaque année, 3,4 millions de personnes meurent, de maladies dues à la pollution de l'eau. Dont plus de 50 % d'enfants de moins de cinq ans. C'est la première cause de mortalité infantile en Inde. L'eau sale tue. Elle tue dix fois plus que les guerres. Et l'eau tue, faute de services d'assainissement. 2,6 milliards de personnes dans le monde, n'ont pas de sanitaires. Et c'est une priorité mondiale, car le scandale de cette mortalité est qu'elle est plus facilement évitable que d'autres formes de mortalité, en investissant, notamment, dans des réseaux d'assainissement. Dans les pays en développement, 40 % des égouts se déversent directement dans les rivières, sans aucun traitement. Ce qui, naturellement, pollue les nappes phréatiques et les différentes sources d'eau. Deuxième sujet : la pollution de l'air. Les dernières estimations de l'OMS montrent que la pollution de l'air est devenu le premier risque environnemental pour la santé. Sept millions de personnes sont décédées prématurément, en 2012, à cause de la pollution de l'air. Et la très grande majorité des victimes, plus de 80 %, vivent dans les pays pauvres. Ce qui est aussi important de noter est que 60 % meurent à cause de la pollution de l'air de leur maison. Le problème principal est la pollution de l'air intérieur, tout particulièrement à cause du chauffage domestique au bois, ou du charbon, dans des habitats mal ventilés. La pollution de l'air, a un impact beaucoup plus important qu'on ne l'imaginait. Les experts de l'OMS affirment même, que peu de risques ont un impact supérieur sur la santé mondiale, que la pollution de l'air. Le coût, pour la société, est colossal. Il est estimé à 1.4 billions de dollars en Europe et il a été mesuré à 101 milliards d'euros en France. Je pourrais également aborder la question de la pollution des sols, des animaux, ou encore du bruit. Il est important, que vous reteniez que nos pays, tout particulièrement la France, ont bien pris en compte les impacts directs de la pollution sur la santé, pour les polluants les plus nocifs. C'est par exemple, la pollution à l'amiante, au mercure, au plomb, au radon, au dioxyde de souffre, au monoxyde de carbone, ou encore aux nitrates. La France a, depuis plus de dix ans, un plan national santé-environnement, pour s'attaquer à ces polluants les plus nocifs. Et ces actions ont eu des effets positifs : une grand nombre de polluants dits lourds ont baissé dans notre environnement, come vous pouvez le constater sur ces différents graphiques. [AUDIO_VIDE] La France, comme de nombreux pays européens, s'est aussi dotée d'un important réseau de surveillance, pour mesurer la qualité de l'air, de l'eau, et de l'environnement en général. Ce que nous appelons la biosurveillance. Et au-delà de la surveillance, nous analysons l'impact des polluants sur les différents milieux vivants. Ce que nous appelons l'écotoxicologie. Enfin, l'Union Européenne a eu un rôle majeur, en imposant aux différents Etats, de ne pas dépasser des seuils limites pour un grand nombre de polluants. Ces approches sont donc nécessaires, et vous constatez qu'elles ont eu un effet positif. Mais elles ne sont pas suffisantes. Il ne suffit pas, de fixer des seuils limites polluant par polluant, il faut les additionner. Les études montrent que notre santé peut être profondément altérée, si nous sommes exposés à un cocktail de polluants. Et, même à de faibles doses, durant toute notre vie. Ceci conduit à une nouvelle approche, de la relation entre l'environnement et la santé, que nous verrons dans une prochaine vidéo. Mais, retenez aujourd'hui que l'impact de la pollution sur notre santé est une question ancienne. Que ces pollutions, sont l'une des premières causes de mortalité dans le monde, que les politiques engagées se sont concentrées sur les polluants les mieux identifiés, elles ont été positives, mais encore insuffisantes, pour améliorer la qualité globale de notre environnement et donc de notre santé. Je vous remercie. [AUDIO_VIDE]